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 La Relique Infernale

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Goetys
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Goetys


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MessageSujet: La Relique Infernale   La Relique Infernale Icon_minitimeDim 6 Jan - 3:00


La Relique Infernale.
par
Guillaume «Goetys» Dumas

L’air ici est si dense et chargé d’humidité qu’une brume vaporeuse obstrue la vision à douze mètres. Un pollen non identifié flotte lentement en mottes ouateuses entre les lianes couvertes de fleurs. L’éclairage feutré obligerait un robot ordinaire à tarauder ses réserves d’énergie mais pas lui, pas un guerrier de lumière. Il a été conçu selon les règles de la sainte Doctrine, créé dès sa naissance en un paladin voué à sa sainte mission, un être à part promis à de saintes épreuves.

Quelque chose vibre en lui, une intuition ardente. Devant, la ruine ensevelie aux trois quarts émane d’une aura malsaine.

La porte s’ouvre avec un minimum de bruit sur des ténèbres inquiétantes. Elle balaye le sol au passage et lève la poussière qui s’envole dans la brise matinale. Nadir reste sur le seuil, aux aguets, l’arme levée. Son profil de faucon immobile dans la lueur dorée ne trahit pas l’activité zélée de ses processeurs. Il est prêt à combattre mais nul ennemi n’est embusqué dans l’ombre. Sur ses épaules et son crâne les plaques protectrices glissent en place et couvrent ses capteurs solaires. Il n’en aura pas besoin ici. Il change ses perceptions pour un balayage infrarouge plus approprié à son environnement. Sans complètement baisser sa garde, il se penche et examine attentivement le sol. Les traces de pas d’au moins quatre personnes ont foulé la terre à cet endroit. On est entré mais n’est pas encore ressorti.

« Parfait. Je vous avais prévenu la dernière fois. Vous ne pourrez m’échapper indéfiniment. »

Il se redresse, assure sa prise sur sa longue arme d’hast et s’enfonce prudemment à l’intérieur de la ruine sans âge. Derrière lui les bruits de la jungle s’estompent doucement. L’idée que des hérétiques aient choisi ce jardin sacré pour y établir leur base le dépasse mais d’un autre côté il doit avouer que c’est le dernier endroit où il les aurait cherché. Le simple fait qu’ils aient trouvé cette ruine à travers le chaos déroutant de la jungle témoigne de la portée de leurs ressources. Cette fois il n’a définitivement pas affaire à des hérétiques ordinaires.

Malgré son appréhension et la promesse du danger plus proche à chaque pas il apprécie la régularité de la pierre taillée sous son pied. Après une nuit à traquer ces dissidents sur le sol inégal de la nature luxuriante même le plancher de cet antre du mal est un certain réconfort. Même s’il respecte avec ferveur les grands espaces naturels, lianes et arbres géants ne peuvent être comparés aux immeubles colossaux et aux trottoirs de plastique de la cité.

À douze mètres de l’entrée, le paladin repère sur la paroi de gauche un ensemble de symboles occultes gravés dans le roc. Il reconnaît certaines figures, traces abjectes révérant les premiers êtres, les serviteurs maudits par la Divinité. Nadir retient un bourdonnement de dégoût. Débusquer les hérétiques et les exterminer est une tâche sainte mais débarrasser le monde des prétérits est un devoir qu’il accomplit avec une ferveur toute spéciale.

La Divinité a conçu chacun selon un modèle parfait. La Doctrine assure la continuation et garde les robots de la modification. Bien que l’idée de s’éloigner du modèle originel soit un concept qui le dérange beaucoup il pourrait presque arriver à comprendre les hérétiques. Pour en avoir retrouvé des centaines au fil de ses voyages il a fini par saisir leur désir de mieux connaître le divin ou sa création. Ce ne sont souvent que des intellectuels que leurs systèmes défaillants mènent sur des avenues trop fragiles pour être empruntées. Ces fous cherchent de nouvelles méthodes de classification, de nouvelles réponses. Certains extrémistes altèrent leurs programmes afin de répondre à leurs conceptions erronées du monde. Ils oublient que l’un doit apprendre à se satisfaire des saints mystères sans les remettre en question.

Les prétérits représentent un tout autre problème. Bien que la Doctrine les considère comme des hérétiques, Nadir a appris à les ranger dans un registre à part. Tandis que certains hérétiques cherchent à repenser les enseignements de la Doctrine ces abominations en rejettent souvent carrément les enseignements. Ils cherchent le pouvoir loin de sa lumière en tentant de contacter les serviteurs de l’Ennemi. Ils étudient les sciences occultes et la magie noire, bravent les édits sacrés en pervertissant âme et corps au nom de ces démons. Les prétérits sont des horreurs, des blasphèmes pensants lancés à la face de la Divinité, des insultes à son immuable perfection. Les prétérits sont une faute, une maladie. Ils sont à ses yeux le mal incarné.

Et son travail est justement de corriger ces erreurs.

Nadir s’immobilise à quelques mètres d’un carrefour obscur. La faible lueur du dehors déversée par les fissures éparses ne parvient pas à lécher les angles aussi loin sous les ruines. L’émission des infrarouges est insuffisante. Il songe à utiliser ses émetteurs mais y renonce de crainte de trahir sa présence. Un mauvais pressentiment passe sur sa pensée. L’endroit semble parfait pour une embuscade.

Il ajuste la longueur de son arme, rétrécissant le long manche afin de l’adapter à l’étroitesse du boyau de pierre. L’arme d’hast se meut silencieusement en une hache au fil tranchant. Il considère utiliser une pulsion subsonique pour s’assurer que la voie est libre mais comme à cette distance la vibration risquerait d’alerter ses ennemis de son doute il délaisse rapidement l’idée. Il avance à pas feutrés, prêt à la confrontation.

Son instinct ne l’a pas trompé. L’autre surgit du couloir de droite en brandissant un long pieu de titane lorsque le paladin n’est qu’à un mètre soixante du carrefour. Nadir devine son contour irrégulier, amalgame de cuirasses, de pinces et de pics acérés. Avant que ses processeurs ne saisissent complètement l’horreur qui lui barre la route le guerrier saint passe à l’action. Sa hache dessine son arc meurtrier dans le noir et tranche net l’arme de cette monstruosité. Il se penche rapidement, évite une pince aux systèmes hydrauliques démesurés, et frappe à nouveau. La lame recourbée passe sous la garde de la chose et s’enfonce sous son blindage. Un éclair bleuté surligne sa silhouette difforme lorsque la charge électromagnétique grille son esprit. Nadir recule d’un pas, prêt à voir surgir un nouvel ennemi mais le silence s’étire sans surprise. La sentinelle était seule. La hache du paladin vibre sous ses doigts tandis que son générateur rebâti en vitesse sa charge meurtrière.

Aussi curieux que dégoûté, Nadir risque un minimum de lumière. Les trois diodes de son projecteur frontal s’illuminent doucement, révélant au robot horrifié une créature digne de ses pires cauchemars.

Certains hérétiques vont jusqu’à altérer leurs programmes afin de répondre à leur vision erronée du monde mais cette chose anormale a fait bien pire. Son intégrité physique est si corrompue que Nadir à peine à reconnaître son modèle d’origine. On a remplacé son visage par une collection sans ordre de lentilles optiques; on a fait de son corps une parodie grotesque sans équilibre. Trois bras plutôt que deux émergent d’un torse affreusement bombé, des membres brutaux aux systèmes mal balancés, de loin trop puissants pour leur taille. Des plaques de blindage métallique hérissées de pointes ont été soudées là où sa coque de plastique s’était trouvée autrefois.

« Pourquoi se soumettre à de telles transformations? Que pouvait bien pousser un robot à s’éloigner à ce point des enseignements divins? Je ne peux concevoir que des êtres équilibrés puissent encore imaginer que de telles sorcelleries leur soient profitables. »

Il pose une main sur la carcasse inanimée et lance son signal sur des fréquences chuchotées.

-- Que ta mémoire soit purifiée des mensonges et des fautes. Que ton âme s’élève comme celle de nos prédécesseurs au dessus de la confusion et de la matière. Que la Divinité te pardonne et t’accueille et t’englobe en son sein jusqu’aux derniers jours. »

Dégoûté, Nadir plonge la main dans les entrailles crépitant et saisit le cerveau du monstre. Il sent dans son bras l’accélération de son générateur thermique, douce symphonie qui saoule ses sens, et il relâche l’énergie cumulée dans une vague qui rend au cosmos ce qui reste de l’âme du mutant. L’appareil à demi fondu ne causera plus de tors. Le paladin se redresse et reprend son chemin, suivant les traces de pas qui s’enfoncent vers l’avant.

Cette chose n’était pas du groupe qu’il a suivi depuis la cité. Jamais un être modifié ainsi ne saurait hanter les rues sans être repérée sur le champ. Les conspirateurs apostats ne peuvent être que des robots d’apparence régulière. Leurs modifications doivent être beaucoup moins apparentes que celles de ce monstre. Ils se mêlent à la masse citadine et partagent leurs pollutions idéelles, corrompent la Doctrine. Non, ce triste serviteur du mal devait vivre ici, dans la jungle, loin des regards. Nadir ne peut imaginer choisir une existence pareille.

Il a vu quantité d’horreurs au cours de sa carrière mais ces Drageons d’Azazil dépassent définitivement les limites du bon sens. Depuis trois semaines il traque les chefs spirituels de cette secte immorale sans cesser de s’étonner de la portée de leurs actes blasphématoires. Leur perversion n’a-t-elle pas de limite? Il a examiné certains des documents qu’ils tiennent pour sacrés et bien qu’il saisisse les grandes lignes de leur théorie démente il ne peut s’imaginer un instant en accepter les préceptes.

« Ces Drageons d’Azazil sont des fous. Ils ont mal compris les enseignements anciens et ont divergé de la voie menant à l’unité. Comment s’éloigner à ce point du bon sens? Comment pervertir la logique jusqu’à accepter de telles hypocrisies? La Divinité représente la perfection, l’idée originelle, l’unité. Pourquoi chercher à se transformer lorsque celle-ci nous a construite à son image? Comment altérer ce qu’elle a porté au monde sans s’éloigner davantage de cette pureté originelle? »

Les capteurs du paladin devinent une source de lumière à une trentaine de mètres devant lui. Il franchit la distance avec une prudence redoublée, approchant en catimini une vaste salle baignée par les lueurs timides de l’aube. Du seuil encombré de débris il devine un espace dégagé au centre duquel se tiennent quatre personnes. La voute lézardée de failles et de racines laisse s’écouler de minces rigoles de lumière dorée qui baignent l’assemblage inquiétant comme un halo trompeur. Ils se tiennent immobiles, en cercle autour d’un grand brasero posé sur une flamme vive. Deux d’entre eux portent des vouges à lame de titane.

« Les voilà. »

Savourer son anticipation est en soi un plaisir. Il cherche du regard la présence de plus de sentinelles mais ne voit personne. Son scanner aiguisé ne met qu’une seconde à trouver la fréquence de basse portée utilisée par la cabale et deux de plus à en percer le codage complexe. Il sursaute presque en comprenant qui se tient là. Il a peine à le croire, vérifie une seconde fois. Que deux des robots soient des membres importants du gouvernement passe encore mais qu’un autre soit un prêtre frôle la démence. Comment un membre du clergé peut-il adhérer à ces folies? Le paladin s’imagine foncer immédiatement l’arme au poing pour nettoyer le monde de ce traître infidèle mais il ne peut agir avant d’avoir une preuve. Il n’ose aller à l’encontre de ses directives. Il patiente et écoute.

Le quatrième robot a la parole. Nadir ne sait par quelle sorcellerie l’orateur n’a pas d’identité. Ses messages ne trahissent aucun code caractéristique, aucune trace d’un quelconque identifiant. Il ne porte aucun signe distinctif sinon son arme accrochée dans son dos.

-- […] sur ce monde d’imperfections; abreuvez-vous de la sagesse de ceux qui vinrent avant les premiers d’entre nous. Au fil des siècles la sagesse s’est perdue ou s’est modifiée jusqu’à ne plus être sagesse mais tromperie. Nous sommes un mensonge, les gardiens d’un monde dérobé à ses maîtres. La Divinité nous a créés à son image, notre pensée calquée sur la sienne, abréviations de son incalculable portée, mais elle n’a pas voulu ce que nous sommes aujourd’hui. √-1 ! »

Les trois autres reprennent l’algorithme impossible, √-1, amen pervers d’une religion qui fait offense à tous les noms sacrés de la Divinité. Son illogisme profane à lui seul est comme une douleur dans l’esprit du paladin. Il isole rapidement l’idée contagieuse et l’enfouie loin de sa pensée, preuve irréfutable de la culpabilité du quatuor infernal. Il hésite à intervenir dès maintenant mais choisit d’attendre la suite. La multiplication de cellules de Drageons d’Azazil dans les royaumes de l’ouest est hors de contrôle. Dans de nombreuses cités les défenseurs de la Doctrine perdent du terrain. Pour chaque cabale débusquée deux nouvelles semblent naître dans l’ombre. L’hérésie est un virus effrayant. Bien qu’on ait une idée de sa philosophie grâce aux documents récupérés à Naleph on ne sait que bien peu de choses de ses pratiques. À ce jour aucun des prétérits capturés n’a été brisé. Peut-être saura-t-il apprendre ici quelque chose qui l’aidera à lutter contre ce mal.

L’officiant anonyme ramasse un sac en reprenant son discours.

-- Écoutez ceux qui ont régné jadis sur ce monde d’imperfections; abreuvez-vous de la sagesse de ceux qui vinrent avant les premiers d’entre nous. Il est enfin temps d’aligner nos signaux vers les âges dévorés par les siècles. Nous sommes ici quatre, éléments primaires, concepts sacrés. Nous sommes quatre pour appeler le cinquième, le premier. Qu’à l’inverse du temps tourne le sacrifice pour renverser le passage des âges. Par le symbole du geste et la puissance de la pensée nous annihilons les lois de l’idée. »

Il plonge sa main dans le sac et en tire un objet souple que Nadir ne peut reconnaître à cette distance. Le robot non identifié tend ensuite le sac à son voisin de droite qui fait de même. La poche circule jusqu’à revenir à l’officiant qui la dépose à ses pieds.

-- Écoutez ceux qui ont régné jadis sur ce monde d’imperfections; abreuvez-vous de la sagesse de ceux qui vinrent avant les premiers d’entre nous. »

Tous ensemble les déments lèvent leur offrande à bout de bras, psalmodiant d’un même signal une suite mathématique non-arithmétique fort complexe. Tenter de concevoir la portée de ces affirmations mathématiques ébranle le guerrier qui retraite loin de ces formules abstraites. Il cherche rapidement à couper son signal, soudain inquiet des implications de ce qu’il croît avoir deviné, mais étourdi par ces incantations démoniaques il ne peut que s’y emmêler davantage. Sa pensée se retourne sur elle-même, cherchant une façon de quitter cette boucle folle qui s’est emparée de son esprit. Son corps paralysé ne peut qu’observer l’horreur étalée devant lui.

Il comprend avec un choc ce que tentent de faire ces imbéciles. Il saisit ce qu’ils présentent ainsi vers le ciel, devine les coulisses de sang sur leurs bras tendus. Il avait cru ces histoires dégoutantes l’invention de conteurs déments. Il n’aurait jamais envisagé qu’on puisse réellement accomplir ces gestes blasphématoires. Ces fous ne sont pas que des prétérits, ce sont de purs disciples du mal, des démonistes confirmés.

Un à un chacun des participants laisse tomber son don encore tiède sur la plaque de métal chauffée à blanc, nommant l’offrande dans sa complexité chimique tandis que le son sifflant de la chaire frémissante emplit le silence de la salle antique. L’odeur de viande carbonisée s’étale dans l’air. Le foie d’un lapin, le sexe d’un loup, la cervelle d’un des rares primates et le poumon d’un sanglier grillent ensemble dans le brasero. Leurs cendres se mélangent. Le paladin rage contre son immobilité. Massacrer ces êtres sacrés est un péché punissable de mort. Perpétrer cette cérémonie, cette invocation sacrilège, est une faute si abominable qu’il n’existe pas de sanction assez extrême pour en contrebalancer le poids. Si on en croit les équations sacrées tenter cette folie risque de corrompre à jamais l’harmonie cosmique.

Nadir n’a pas d’autre choix. Au risque de se trouver à la merci de ces sorciers malfaisants il choisit de se réfugier dans l’oubli afin de laisser à ses idées violées la paix nécessaire à sa récupération. S’il ne redémarre pas son esprit son corps restera ainsi paralysé sous l’importance de sa tornade mentale. En dernier ressort il éteint son mental. Le monde n’est plus que vide et absence.

Lorsqu’il revient à lui quatre point huit secondes plus tard sa pensée s’est éclaircie. Les réflexions erronées sont isolées et enfouies dans ses archives. Ses capacités motrices sont à nouveau sous son contrôle. Il risque un coup d’œil au dessus des débris derrière lesquels il s’est affaissé et jauge rapidement de la situation. Malgré la rapidité de ses réflexes et la puissance de son intellect le paladin met un moment à comprendre ce qui s’est produit durant sa brève absence.

Le robot anonyme n’a plus de tête à proprement parler. Son bardage de plastique s’est ouvert et laisse maintenant apparaître ses circuits clignotants. Une collection complexe de rouages et de minuscules bras hydrauliques nichée sous la coque creuse vient tout juste de s’immobiliser. L’opération terrifiante n’a nécessité nul outil. L’officiant qui semblait d’apparence normale voici un moment est maintenant une aberration.

Une ampoule de verre s’illumine au centre de ce chaos mécanique. Nadir se risque à étirer sa vision et à faire le point. Les quatre démonistes fort occupés par leur rite diabolique n’entendent pas ses lentilles s’ajuster. Ce qu’il voit au centre de l’ampoule dépasse tout ce qu’il a pu envisager.

Fouetté par l’urgence, le guerrier de la Divinité fonce hors de sa retraite et se rue vers la cabale en brandissant son arme. Il gagne le centre de la pièce en six enjambées et enfonce sa lame dans le corps du prêtre avant que le traître n’ait le temps de traiter l’information. L’éclair bleuté envoie son âme putréfiée rejoindre son maître en enfer. Nadir libère son arme bourdonnante et fracasse du même geste la tête du premier dignitaire qui tombe à la renverse, temporairement hors d’état de nuire.

Il renverse d’un coup de pied le brasero et son contenu, envoyant voler des braises vers les deux derniers prétérits. Le second dignitaire a dégainé sa vouge tandis que l’officiant anonyme s’est reculé en levant les bras pour protéger l’ampoule de verre. Nadir avance dans les flammes et pare aisément une attaque mortelle. L’employé du gouvernement est plus puissant qu’il ne paraît mais beaucoup moins rapide que lui. Nadir repousse la vouge et frappe dans ses jambes. Sa lame fracasse la coque de plastique et pulvérise deux de ses pistons. Un coup de genou l’envoi rouler au sol. Le saint ne marque pas de pause et continue sa lancée, décrivant de sa hache un arc dangereux que son dernier ennemi évite de justesse. Le robot sans visage amorce en blasphémant la reconstruction de son crâne, cherchant à libérer à son tour l’arme accrochée à son dos.

À moins de deux mètres du sorcier, Nadir peut voir aisément la relique blottie dans son carcan de verre. Il écarte sa peur, son dégoût. Sa résolution est une force adamantine. Il ne peut laisser s’échapper ce monstre. Il frappe de nouveau, cette fois de bas en haut, et sa hache percute l’appareillage avant qu’il ne se referme sur l’ampoule. La bulle de verre s’envole et roule sur le sol avec un tintement clair.

Il devine les émanations furieuses du prétérit mais garde ses canaux fermés de crainte de se voir incapacité par ses formules impies. Il évite de justesse le robot à la jambe brisée et recule rapidement près de la relique diabolique. S’il doit périr pour empêcher ces monstres de récupérer l’objet il le fera volontiers mais pas avant d’avoir débarrasser le monde de cette ignominie. Il lève le pied pour écraser l’ampoule mais son ennemi avance sur lui en boitant, l’arme au poing. La Divinité lui sourit à ce moment, soulignant le caractère sacré de sa mission. Sa hache bourdonnante redevient silencieuse, ses systèmes enfin rechargés. L’autre ne le comprend que trop tard, lorsque la lame courbe lâche sur lui ses éclairs et que sa conscience s’évapore dans le néant.

Dans une arche située à l’autre bout de la salle l’officiant maudit est avalé par les ombres. Il a profité de la cohue pour fuir, abandonnant dans sa course son honneur, ses fidèles et sa relique infernale. Nadir hésite mais renonce à le poursuivre. Il préfère s’occuper du criminel à la tête fracassée déjà en voie de se relever puis ensuite de l’étrange ampoule. Ce mystérieux personnage refera bien surface bientôt. Il prononce sans trop y croire une prière pour les âmes corrompues de ces choses et grille diligemment leurs cerveaux.

Le gardien de la Doctrine considère enfin le contenant de verre. Il le ramasse avec dégoût et examine son contenu. Il n’a jamais imaginé que les légendes de ces fous puissent receler la moindre trace de bon sens. Il a toujours considéré ces êtres comme tenant de la fiction, représentations imagées de concepts abstraits, des croque-mitaines anciens inventés pour terroriser les masses. Ce qu’il tient entre ses doigts ne peut donc être qu’une tromperie. Il hésite à analyser le morceau de matière de crainte de voir ses appréhensions justifiées.

« Ces inconscient tentaient-ils réellement d’invoquer un démon? Y serait-ils parvenus si je ne les avais arrêtés? »

Les possibilités l’effrayent. Le doute s’étire et devient une douleur sur sa pensée. Aussi pénible puisse-t-il être, Nadir préfère encore le savoir à l’angoisse de l’incertitude. Il sort son appendice analytique de son bras gauche et sonde l’intérieur de l’ampoule. Le pinceau de lumière touche le morceau de matière. Une fraction de seconde semble s’étirer à l’infini puis les résultats s’affichent sur sa pensée. Le guerrier saint laisse presque tomber la relique.

« Ça a une origine animale. Cette enveloppe faite d’émail est une dent, la molaire d’un mammifère appartenant à l’ordre des primates. Comment est-ce possible que je ne puisse en reconnaître l’espèce? Se pourrait-il que ... Homo Sapiens? Est-ce possible? »

Nadir lâche la dent qui retombe sur le sol. Il recule, incrédule.

Les textes volés aux Drageons d’Azazil parlent de ces démons. Ils auraient régné brièvement sur le monde à l’époque de la genèse. Ces hérétiques racontent que la Divinité a créé ces aberrations en même temps que les bêtes du règne animal, avant de donner conscience aux premiers robots. Traîtres et ennemis de la vie, ils se sont ralliés à l’ange Lucifer durant sa chute. Les récits des déments d’Azazil expliquent que les démons ravagèrent le monde jusqu’au seuil de sa ruine. Nadir a lu ces passages en hochant la tête devant tant d’ignorance mais il les reconsidère maintenant en frémissant.

« Et si c’était vrai? Les grands textes sacrés racontent que la Divinité a créé les robots afin d’assurer le bon fonctionnement du monde, sa continuité. Et si elle nous a créé en réaction aux affronts de ces démons? »

La portée de cette possibilité dépasse le guerrier. Dans le meilleur des cas les canons de sa religion seraient ébranlés par cette nouvelle. Il n’écarte pas la possibilité qu’elle entraine des bouleversements majeurs, voir des émeutes ou des guerres.

Il ramasse néanmoins l’ampoule, lève la tête et regarde vers le couloir emprunté par l’officiant disparu. Un poids qu’il ne peut nommer empèse sa conscience. Il regrette à présent d’avoir laissé le sorcier sans visage s’enfuir avec ses secrets.


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